Avant de vous proposer ce texte, je tiens à préciser plusieurs éléments. Comme certaines et certains l’ont deviné dès le titre, il s’agit d’un récit tiré des Animaux Fantastiques 3 Les Secrets de Dumbledore. Je n’ai donc pas créé ces personnages, ni inventé la scène que je vous présente ici. Étant plutôt objectivement déçu par ce que donne à voir cette nouvelle saga dans le Monde des Sorciers, je me suis autorisé de réécrire quelques moments du films pour y ajouter des propos de ma mythologie et tenter d’y apporter un peu plus de profondeur (sans forcément y parvenir). Vous constaterez rapidement qu’il y a, au final, dans ce premier plagiat, extrêmement peu de différences avec ce que vous connaissez du film original pour ceux et celles qui l’ont vu. J’ai surtout étoffé les dialogues dans le cas présent. Sur ce, une bonne lecture à vous !
Chuintement de l’eau chaude. Vapeur. Grelottement de la porcelaine. L’incolore qui se rétractait, contré par de fluides rubans ambrés s’y épanchant. Légers, deux talons larges flottèrent par-dessus la moquette, étouffèrent leurs clameurs, se faufilèrent entre les pieds des chaises et s’interrompirent délicatement, leurs pointes disparaissant sous la table. En gestes rapides et précis, la serveuse établit sur la nappe, face au client, soucoupes et tasses, sucrier, crémier, cuillère, puis, le plateau terni retenu par ses bras clairs, demande :
« Vous désirez autre chose ?’
Le crâne couvert de cheveux châtains tirant sur le roux se haussa, l’homme releva son regard de ses genoux, un mince sourire sur son visage subtilement strié de rides. Un souffle, il s’élança.
« Merci. Je… »
Sa voix chevrote, ses yeux bleu diamant s’accroche à l’anse blanche. Il déglutit discrètement, sourit aimablement.
« J’attends quelqu’un. Peut-être un second thé. Merci. »
La serveuse acquiesça et s’éloigna de ce même pas affirmée. Aussitôt, Albus saisit un sucre, le plongea dans sa boisson, son couvert tinta pendant qu’il remuait et une pâle lueur émanant de sous lui ourla son menton, sa barbe captant cette clarté. Ses paupières se fermèrent, il perçut le tumulte de la salle, les nœuds de voix fortes, les clapotis de la vaisselle, les chuintements des vêtements. Et, au-delà, le son sourd de semelles qui s’approchait de sa table, assuré. Lorsqu’à nouveau ses iris se parèrent d’étincelles, ils plongèrent dans ceux, vairons, d’un homme debout devant lui, aux vêtements parfaitement ajustés, sa mèche blanchie courant de son front à son oreille gauche. Sur ses lèvres naquit un sourire que l’autre lui rendit immédiatement. Mais, quelques secondes après, il écarta ses pupilles et examina le lieu, son expression se refermant, avant de retrouver celles de son hôte.
« Tu as tes habitudes ici ?
– Je n’ai mes habitudes nulle part. »
Un soupir amusé échappa à Gellert. Il s’installa sur la banquette et fixa l’homme de l’autre côté. Leur silence se prolongea, sans gêne aucune, interrompu par l’apparition de la serveuse qui déposa une seconde tasse, Gellert s’écartant d’elle. Libérée de sa présence, il s’inclina par-dessus les volutes, ne détachant pas son regard du céruléen cristallin d’Albus.
« Montre-le moi. »
Empli par le calme, Albus soulève son bras gauche, l’étend par-dessus la nappe blanche jusqu’au centre du plateau et déplie lentement ses doigts, dévoilant au creux de sa paume un bijou en argent, un octaèdre ciselé d’arabesque, son cœur enchâssant une bulle de cristal iridescente, l’une de ses extrémités achevé sur une pointe effilée, l’autre rattachée à une fine chaîne qui s’entortillait autour de son poignet et rampa sur son avant-bras. Le globe les baigna d’un halo laiteux.
Grindelwald lâcha un soupir, de joie et de mélancolie, sa main esquissant un geste vers le pendentif, mais il se redressa.
« Parfois, je ressens encore son poids autour de mon cou. Je l’ai porté tant d’années. Comment te sens-tu avec ? »
Le visage impassible, Albus ne répondit pas ; Gellert réitéra sa question d’un simple battement de paupières.
« Nous pouvons nous en délivrer, Gellert. »
Il souffle, jette un œil alentour, finit par revenir à Albus. Tant d’émotions coulent rapidement dans ses saphirs translucides.
« Il fut un temps, nous avions beaucoup plus en commun que cette magie. »
Avec dédain, il désigna l’objet brillant, tenu par Dumbledore, entre eux. Conscient de l’impasse, celui-ci le rangea dans sa poche
« Ce que tu fais est de la folie…
– C’est notre plan.
– J’étais jeune, j’étais…
– Engagé. Envers moi. Envers nous.
– Non. »
Gellert infléchit imperceptiblement sa tête.
« Je t’ai suivi parce… »
Temps
« Parce que ?
– Parce que j’étais amoureux de toi. »
Un long moment, en silence, ils se dévisagèrent. Albus détourna son visage.
« Ce temps n’est pas si éloigné, Albus. »
Un éclat bleu s’opposa au gris mate.
« Je n’ignore pas tes actes. »
Gellert inspira profondément, expira, enfin, huma.
« Quelle odeur infecte. Ne trouves-tu pas ? As-tu réellement l’intention d’abandonner les tiens pour ces animaux ? »
Albus demeura muet. Son invité fixa avec hauteurs les personnes qui les côtoyaient. Nonchalamment, son vairon immobile face au visage barbu, il poursuivit.
« Sais-tu, Albus, comment considèrent les Moldus des individus tels que nous ? Ils nous qualifient de malades, de déviants, de contre-nature. Ils nous enferment, nous exposent à des jets d’eaux glacés, nous injectent des solutions, nous électrocutent, nous castrent. Pour nous soigner. Pour que nous ne les contaminions pas. Ils nous tuent. »
Un silence lourd tombe, rempli par les babillages du salon. Une fois de plus, Gellert porte son attention sur leurs voisins.
« Ils sont si stupides, menés par leurs peurs. »
Il se reporte sur Albus.
« Tu disais vouloir transformer le monde, que nous en avions le droit. »
Dumbledore frémit.
« Je vais en fonder un nouveau, avec ou sans toi. Mais tu ne peux rien faire pour m’en empêcher. Déguste bien ton thé, Albus. »
En un instant, il fut debout, son thé intact, et se dirigea au travers de la salle vers la porte, son long manteau noir palpitant contre l’arrière de ses genoux, le regard d’Albus dans son dos, ne s’évanouissant qu’après qu’il se soit égaré dans la rue. Seulement là, les yeux de Dumbledore glissèrent jusqu’au Pacte de Sang posé dans sa main installée sur ses genoux, scintillant avec tranquillité et douceur.
Lorsqu’il revint à lui, ses doigts quittèrent son visage, le contact de la chaîne tiède avec sa joue rompu ; assis sur une chaise en chintz, il redécouvrit les pierres courbes de son bureau, parcourues par les chatoiements du feu de cheminée et la lumière blafarde de cette après-midi nuageuse qui filtrait par les fenêtres.