Confinement 016 : Vincent / Mynette / Jean

Moustache blonde ténu, aux pointes enroulées, yeux bleus dense et attentif, son visage effilé se concentre sur son instrument, maintenu avec bienveillance. Devant lui s’étend les fils bandés de sa harpe, minutieusement scruté. Les grandes mains se placent de chaque côté de l’objet, les doigts effleurent les cordes, de faibles notes grimpent dans l’atmosphère, début d’un récital. Immédiatement, le corps s’accélèrent, tandis que la musique s’écoule dans un flot quiet. Les phalanges à demi-repliées sautent d’une extrémité de la harpe à l’autre, bondissent, tressautent, rebondissent. Pour l’œil, elles ne touchent pas les cordes, pourtant les fils vibrent et s’expriment, parallèles aux identités propres, interrompues, lorsque l’exige le moment, par le plat de la main. Les gestes étalent une élégance multiple, une beauté précise, valse sur l’instrument et sur l’air, en compagnie des harmonies qu’elles produisent. Sublimités pour l’oreille et l’œil.
L’extrait s’achève, les bras s’abaissent, quelques tonalités frémissent encore dans l’atmosphère. Couronné par la moustache, aussi raffiné qu’elle, un minuscule sourire conclut son présent.

Des cheveux cascadent en fins fils châtain qui se déversent sur ses épaules et se scindent sur sa poitrine et son dos, fluides et fermes, bordant son visage comme une eau lisse. Deux immenses yeux ronds jaillissent de cette figure, parcourut de centaines d’éclats : pétillements d’amusements, lueurs de malice, scintillements de tendresse, ardeurs de sensualité, flammes de colère, qui brillent tantôt sur ses pupilles, tantôt sur ses iris, quelques fois transpercent les deux. Au dessous, un nez en demi-cercle et plus bas encore, une bouche aux lèvres minces qui conservent, cachés, à leurs jointures des sourires élongés. En son front bombé s’agite des pensées douces, des idées folles, un esprit embrasé. De cet océan brûlant surgit des vagues de gestes, des écumes de mots, des houles d’expressions : son corps fluet danse, chuchote des chansons, écrit poésies et harangues, se révolte frotté aux contraintes inacceptables. Bassin de rires, de poésies, de rage, elle se partage incessamment.

Bouquet lascif, cheveux impétueux, tourbillonnant et piquant, derrière deux morceaux de verres se plisse un regard espiègle et rieur. Une voix et une gestuelle virevoltantes, légères, délicates s’attachent aux actes qui composent sa vie. De ses doigts naissent beautés et splendeurs, gustatives ou visuelles : gourmandises et sucreries, alléchantes et léchées ou clichés et photographies gracieux et soignés. Ses phalanges ajustent et peaufinent, travaillent et parachèvent des détails et des fioritures dans une profusion saluant, pleine de respect, le baroque. Par moment, sa parole s’effondre en note et timbre profond, déclamant des chants graves, lyriques et vibrants d’opéra. Noble, il emprunte des fils au caractère d’une auguste comtesse et, tout à coup, éventail rejeté, déplié, parés de vastes kimonos froissés, plissés, enveloppant, se moquent de lui-même avec grâce et bonté. Dans ses habits, inconsciemment, il se métamorphose en modèle impressionniste ou en aristocrate début de siècle. Avec autodérision, majesté, finesse, il enchante le monde.

Laisser un commentaire